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A Fleur de Mots

Littérature

LE GRAND LIVRE ROSE 1. A Cécile..

A Cécile…

Saison éteinte, lumière terne, humidité pénétrante, corps endormi… mouvement pétrifié. Les jours et les heures s’étirent en langueurs indistinctes. Pas un bruit, seul le doux crépitement du feu dans la cheminée. Peu de gestes, si ce n’est la danse langoureuse des flammes engloutissant le regard qui se perd à l’infini. Les pensées elles-mêmes s’engourdissent. La graine de l’Éveil marque un temps de pause à son éclosion… Un nuage semble couvrir les éclats de son Soleil.

—Je crains de me perdre… murmure-t-elle.

La méditation serait-elle la solution ?

La solution EST méditation !!

Le grand livre rose s’installe… Il est seul, fermé sur lui-même devant l’écran diffusant une image mobile qu’accompagne une musique relaxante. Cette image sur fond bleu se compose de quatre cercles imbriqués l’un dans l’autre. Le premier, le plus large, ainsi que le troisième, tournent lentement comme glisse le temps sur le chemin des heures, donnant à l’ensemble un mouvement perpétuel. La vie… la vie oui, mais celle que l’on aborde seul dans ses propres profondeurs.

Et le grand livre rose est là, toujours fermé… Il cherche sa place dirait-on, celle qui ouvrira son cœur d’un sourire. Un regard l’observe. Un regard bleu se fondant dans le rose vif de sa couverture. Puis, sans vraiment le quitter, ce regard prend de la distance, aborde d’un autre angle son observation. Une conversation silencieuse semble s’établir alors même que l’image mobile disparaît de l’écran, laissant apparaître celle d’un bol musical tibétain. Dans un silence parsemé de notes limpides aux limites du végétal et de l’eau, deux mains s’approchent, saisissant avec délicatesse le livre, l’emportant près de l’âtre où l’âme cherche un chemin de lumière. Le voilà posé sur une table basse où fume une tasse de thé aux fleurs exhalant des parfums ensoleillés. Tout près, la lecture du moment, Biblique des derniers gestes de Patrick Chamoiseau.

Et le livre rose attend, toujours fermé…

Cinquante Mandalas à colorier, à exposer, à contempler. Cette phrase brille en lettres argentées au bas de la couverture. Les mains n’osent encore toucher. Seuls les yeux caressent du regard ce manteau cartonné à l’aspect si doux, au teint si vif, qui cache entre ses bras une blancheur virginale. Soudain, une des mains se décide. La main gauche, d’un geste rapide, ouvre le livre. D’un geste rapide comme un élan du cœur, rapide comme un sourire qui s’éveille. La page de garde se dévoile dans une totale nudité. Les yeux s’y attachent et l’esprit s’engage… Cette blancheur explose en lui, libérant toute chaîne, toute peur, toute pudeur. Cette grande page blanche offre son sourire et l’immensité d’une liberté. Et l’esprit, dans un souffle, la choisit pour y déposer ces mots, ces quelques mots griffonnés tout près de l’âtre où l’âme avance sur son chemin de lumière. Ces quelques mots qui, quand elle les relit, font perler une larme d’émotion dans l’œil de cette plume qui les dessine à l’encre de ses pensées.

Ce grand livre rose n’a pu, pour l’instant, être abordé que du bout des doigts. Ce qu’il renferme, outre ces dessins appelant la couleur, est encore de l’ordre de l’inconnu. Chaque figure offre son message qu’il nous appartient de déchiffrer et de sublimer. Une première approche entame une balade légère de page en page, un tour d’horizon en quelque sorte. L’œil cherche l’émotion… Déjà, il s’attarde sur des modèles riches en détail où la minutie et la concentration sont de mise. Quand enfin apparaît celui que l’instant lui destine… En son centre, un Soleil, et tout ce qui tourne autour n’est que lui, diffusant ses rayons en une multitude de motifs donnant naissance à l’émotion, libérant la pensée.

Ce grand livre rose est magique.

Le secret de son pouvoir réside dans l’Amour de cette amie qui l’a déposé entre mes mains.

Et Fichtre ! Elle se prénomme comme mon premier nounours.

Le grand livre est là, grand ouvert maintenant. Les crayons n’ont pas encore pris place sur la table. Le regard ne peut se détacher du cercle solaire qui semble vouloir se diffuser en lui. La musique relaxante qui couvre l’instant est profonde, élevée, céleste. L’Univers tout entier entre en jeu. Le Mandala semble prendre vie, tourner sur lui-même. Il entame une danse d’approche. L’œil perçoit par touches brèves quelques notes colorées et une symphonie se met en mouvement. L’œil tout à coup s’éclaire.

—Je ne me perds pas… sourit-elle.

Le Mandala devient un œil. Son propre œil. Elle s’enfonce dans ce regard qui est le sien et qui la met à nu.

—Qui es-tu… vraiment ? Semble-t-il dire.

À ces mots, elle marque une pause…

—J’ai tant de noms, et je suis si peu… répond-elle.

Je suis la Salamandre qui porte en elle le feu de la vie et se régénère à l’infini.

Je suis Poussière d’étoiles, qui survole la forêt aux côtés d’un être mystérieux paraissant né de la dernière pluie.

Je suis Kachou, celle qui converse avec son ami Burkinabè, son frère disparu depuis quelques années, retraçant de sa plume les moments d’intense complicité partagée, et qui tente encore et toujours de mettre les mots les plus justes pour définir cette relation hors du commun.

Je suis la Caresse des Anges, celle qui se laisse glisser le long de l’arête du nez, jusqu’à ce petit creux au-dessus de la lèvre supérieure que l’on nomme la marque de l’Ange, là ou cette présence aérienne pose le doigt à notre naissance en murmurant Chut ! afin de protéger le secret de notre vœu d’étoile.

Je suis Kinou, qui se laisse encore bercer parfois par le doux souvenir d’une voix racontant l’histoire du loup et des sept cabris…

Je suis tout cela, et je suis si peu… Juste une poussière dans l’Univers.

Conversation silencieuse. Les crayons ne sont toujours pas invités. Ce dialogue s’inscrit dans la transparence. L’œil projette dans cette image qui l’observe les couleurs de ses pensées, de ses sentiments. Petit à petit, l’image lui diffuse sa chaleur et il devine que le jaune, l’orange et le rouge domineront l’éclat de ce regard tourné vers lui.

KinouKachou Juillet 2015

LE GRAND LIVRE ROSE 1. A Cécile..
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